Le Moine, le Kid, l’Ami, le GR20 et moi. Chapitre 2 Départ et des doutes

Cette fois le GR20 commence! Enfin! Bah ouais enfin!

Levés dans la nuit, pour partir à la lampe frontale, l’excitation et la motivation sont plus fortes que la fatigue, les doutes et le restes. La fatigue est de la même force quand même…

Rémi et moi même sommes prêts à affronter la montagne, la chaleur, les montées, les descentes, la soif et la faim. Encore une fois n’en fait pas trop stp.

Je descends les escaliers du gite, un peu trop vite. Mes pieds se prennent dans un câble, et comme un con, je tombe sur Rémi en râlant, nous dévalons les marches. Rémi se casse le nez et la cheville. Le Gr20 c’est terminé. Une somptueuse expérience que cette randonnée, on aura essayé.

En vrai, nous ne tombons pas. Nous partons dans la nuit, du gîte de Conca. Nous sommes seuls, mais vraiment seuls, en plus des loups de la nuit et des ours de l’hiver.

Le plus compliqué c’est de sortir du village éclairé par les lampadaires qui crachent autant de lumière que nous de salive, un lendemain de soirée open bar.

Un dédale de ruelles pittoresques plus tard, nous entrons sur le légendaire sentier. Nous sommes contents, cocus mais content (Serge Lama).

C’est tellement beau!

« Je croyais qu’il faisait nuit? Petit polisson de gros mytho que tu es!

Bon, j’avoue tout, il faisait nuit, on ne voyait rien si ce n’est ce qui se trouvait dans le faisceau de ma lampe frontale. De très bonne facture soit dit en passant. #Petzl pour les curieux.

Mais le « moment » est beau. On y est, sur ce fichu GR20, on commence, comme quand t’as faim, et que t’es au Jap à volonté, et que t’as les premiers makis qui arrivent sur la table. Mieux, comme quand j’étais petit, que j’attendais la sortie au cinéma d’Independance Day,  que j’avais acheté tous les magazines qui en parlaient, que j’étais assis dans le ciné et que je regardais les crédits du début, presque les larmes aux yeux, heureux d’enfin m’y frotter.

« Sauf qu’Independance Day, il te démonte pas le corps à coup de gros dénivelés!

-Oui. »

C’est parti. Avec mon pote, on est dans l’aventure. Pas celle avec Will Smith, celle sur le GR20!

On se dépêche d’avancer, pas parce qu’on a peur de marcher dans le maquis, seuls, dans le noir, avec les bruits flippant de la nature, on se dépêche pour voir le lever de soleil sur la mer Tyrrhénienne depuis un plateau, plus haut, plus haut, comme disaient les What For en musique. (Bruno Vandelli: « Quadricolor. »)

Les premières montées, au pas de course nous donne un avant goût de ce que sera cette randonnée. Mais après coup, on se dira que cet avant goût avait la douceur d’un massage des pieds aux huiles essentielles de patchouli comparé a ce qu’on allait manger. Et je vais te spoiler tout de suite, on a dégusté, copieusement même.

On voit notre lever de soleil, et on a l’impression qu’il est à nous, bras dessus, bras dessous, nous nous embrassons presque.

Somptueux, enivrant, doux, roboratif(Ça veut pas dire que ça te transforme en robot, hein?), tout ce que tu veux, tant que c’est un sentiment qui te fait te sentir bien.

On est presque mélancolique mais prêts à en découdre comme Frodon et Sam en arrivant au Mordor. Tu palpes mieux l’envie qui nous guide à ce moment.

La balade est vraiment belle. Les couleurs sont marquées, de la pierre grise claire ou blanche, de la terre couleur terre de chez Jardiland, de beaux grands arbres verts, des petits ruisseaux par-ci(Monie), par-là, un ciel bleu, un soleil jaune, un cadre bucolique. Mais là je ne baratine pas. Oh, tu crois que j’affabule tout le temps? Bah non!

On gambade presque, on court parfois. On est rempli de confiance, on en déborde même. On s’arrête 30 fois, on grignote, on filme, on parle, on rit.

On croise un tchèque, qui passe, nous dit qu’il est Tchèque. On croise des canadiens, des allemands, peu de Français. On croise une source, on s’y a abreuve.

C’est la belle vie, c’est presque facile.

A part des petits moments costauds, et les irritations dues au frottement entre les lanières de mon sac et les bretelles de mon débardeur, on arrive à Paliri, avec une heure d’avance, par rapport au temps prévu.

Izi.

C’est quoi cette arnaque ?  C’est dur le GR20, blablabla. C’est dur quoi? Difficultés quoi? Y’a quoi? Nom d’une pipe!

Je m’en conjure: » Ne fais pas le malin. »

A Paliri, c’est somptueux.

Isolé dans les montagnes, le refuge jouit de magnifiques points de vue. C’est vert, c’est imposant, c’est reposant. Le calme de la nature est puissant.

T’as encore l’impression d’être privilégié, aux premières loges d’un spectacle rare, joué en ton honneur.

« J’ai déjà ressenti ça, une fois en vacances, ma chambre, au premier étage donnait sur une statue de Robespierre… »

Non mais on ne se comprend pas là. Oh, Je te parle d’un tableau millénaire, intacte, crée par la nature, la boss quoi. J’te parle pas de la vue d’une sculpture, aussi magnifique soit-elle.

C’est du très haut niveau. S’il y avait un guide Michelin des paysages, alors ce qu’on nous sert à voir en Corse serait étoilé. Pour sûr, mon seigneur.

Je suis plus clair la? Sinon, je continue dans l’argumentation.

Je savais l’île magnifique, mais après plus de 30 ans, elle arrive encore à me subjuguer, la coquine.

On parle au maître du refuge. On lui explique notre projet de défi de le faire en 8 jours. Il est formel, comme un test de capacités, si on arrive à Bavella, qui représente un quart d’étape, en plus ou moins une heure, on a le niveau et on peut donc commencer a rêver de le faire en 8 jours.

Héhé! Et comment qu’on va le faire en 1 une heure!

Après 2-3 amandes, on part en burn, on court, on saute, on vole, on s’envole, tu t’envoles comme dans Peter Pan. On prend une montée, sale la montée, on ralenti, on marche, on rampe.

Putains de loosers présomptueux que nous sommes!

On n’abandonne pas pour autant, parce qu’on a ouï dire que la montée n’est pas très longue et que la vue d’en haut est bouche béante (Bah quoi? Être bouche-bée devant quelque chose de bouche-béant? Non?) .

C’est vérifié. Nous sommes bouche-bée. Nous profitons.

S’en suit une longue descente.

Mon point fort, c’est la descente.

« Bluff, t’as une spécialité… »

J’explique à mon binôme que je vais y aller en courant, pour ne pas m’épuiser, parce qu’être lent en descente me fatigue, et profiter de ma forme du moment. Mon copinou ne se sent pas de courir.

Je cours en forêt, parce que le paysage est forêteux (En forme de forêt, quoi? Laisse tomber le vocabulaire que t’as pas.). Je dévale, je me sens comme un chien dans un parc avec d’autres chiens, bienlibre et amusé.

Je n’ai que faire des bâtons de randos, d’ailleurs, ils ne m’ont pas servi. Psss.

« Pas encore. Encore une fois, sois patient petit chat, sois patient. » Semble se dire en son for intérieur l’esprit roublard du GR20.

J’arrive en bas, fier comme Artaban. On va le faire en 1h. On va réussir ce test. Mais où est Charlie? Euh Rémi?

Pas de (Do)Rémi(fa), après je me souviens plus) à l’horizon.

Je décide de l’attendre.

5 minutes, 10, 30, 1 jour, une semaine. Rémi n’est jamais arrivé, il est rentré sur le continent où il a repris des études de vétérinaire.

Non, en vrai, au bout de trois quarts d’heure, je décide de rebrousser chemin pour aller à sa rencontre, au cazou.(au cas ou) 

Le test est raté, ça fait déjà plus d’une heure. En beau salaud d’égoïste que je suis de l’avoir laissé, je m’inquiète quand même. Je veux savoir ce qu’il s’est passé et ce qui est compromis. (De pain)

Pas le temps de remettre mon sac, que je l’aperçois au loin. Ouf.

Plus il se rapproche, moins je le vois. Il a le teint aussi resplendissant que celui d’un personnages de Tim Burton. C’est a dire qu’on dirait qu’il a une gastro depuis 2 ans, et il est cerné. (Pas par les flics.) Mais de grosses cernes comme si quelqu’un lui avait mis des patates dans les yeux.

Il est au bout du rouleau quoi.

Il m’explique qu’il n’a plus d’énergie.(Finie batterie Aziz. Les fans de True Lies comprennent.)

Rien, plus rien. Que se passe-t-il bon sang de bois?

On arrive tant bien que mal en haut à Bavella. Après 3h.

« Et pour le test?

-Quel test? »

Bah le test c’est mort.

Cet endroit à Bavella je le connais.

« On s’en fout. »

On a une vue sur les aiguilles de Bavella et sur la vallée. Et encore une fois, c’est propre mon frère! C’est majestueux, tu veux dire!

 On y croise des amis de ma famille.

« On s’en fout de ça aussi. »

On entame à peine la discussion que Rémi s’est endormi comme un veau, sur une table. Baignant dans sa flaque de bave. Mais non, pas de bave!

Le diagnostique est rassurant: Rémi a les deux tibias brisés.

Non, en vrai, il est en déshydratation.

Enfin, c’est ce qu’on lui auto-diagnostique, après un tour sur Doctissimo.

Non, comme on n’a pas de réseau, c’est la conclusion que nous tirons. Docteur House.

Des types lui donnent du magnésium, il boit de l’eau.

On ne pourra pas redémarrer aujourd’hui, c’est une certitude.

Une étape un quart au lieu de deux, une étape qui semblait facile, on grille un joker. Mais on se laisse pas abattre. L’important c’est d’aimer, euh… D’aller bien. Excuse, j’ai confondu avec un autre texte, une chanson que j’écris.

On discute de la suite. On sait qu’après ce joker grillé, on devra tripler les étapes, si on veut être dans les temps. Pas par choix, nom d’un petit bonhomme, j’ai 8 jours, et c’est tout, basta!

Pourquoi? Qu’ai je de prévu ensuite? Je t’en pose des questions? Non, mais j’ai le droit d’avoir une vie privée? Je peux vivre comme je l’entends sans t’expliquer mes faits et gestes. Je suis libre merde, libre!

« Calme toi. »

Rémi en bon capitaine, a l’âme d’un guerrier et beaucoup de ressources. Il se prépare une part de semoule. Une sieste pour mon Rémi-molette! De l’eau, un bon repas à l’auberge après la sieste, veau, pâtes, fromage, une douche chaude, une bonne nuit bien grasse, un Mars et il repartira.

On se lèvera tôt demain pour partir dans la nuit, à la frontale et gagner du temps sur les étapes, sauf s’il fait moche, car on doit passer par une variante alpine.

Avant de dormir, je regarde mes pieds. Ça va. Ça va et toi?

Je m’endors devant un épisode d’une série dont je tairai le nom, après une « petite » portion de semoule. Classe.

Je m’endors un peu trop tard.

Le putain de réveille sonne.

« Putain » parce que là je le kiffe pas du tout.

« Et? »

Et? Bah, la prochaine fois, je te raconte, promis.

 

Si tu veux lire le chapitre précédent: Le Moine, le Kid, l’Ami, le GR20 et moi. Chapitre 1-Préparation

6 Replies to “Le Moine, le Kid, l’Ami, le GR20 et moi. Chapitre 2 Départ et des doutes”

  1. Trop bon de te lire Youri ! 🙂
    Je suis les posts de Rémi et c’est génial de lire les tiens aussi sur une tonalité qui me ressemble pas mal avec tous tes jeux de mots mo-motus !
    Vivement la suite !!!

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    1. 🙂 Merci Cynthia, ça me fait plaisir! Je vais aller voir de suite ton blog! J’essaye de publier au plus vite, mais je suis en Road Trip aux USA, pas évident de trouver du temps! Je vais faire mon max(Mad)… Je me suis pas foulé sur celui-ci. 😉

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